Effectuer un don manuel en différant le paiement des droits à son décès
Les dons manuels sont soumis à l’impôt sur les dons, en particulier lorsqu’ils sont divulgués à l’administration fiscale par le donateur. En principe, le don doit être déclaré à l’administration fiscale (via la déclaration électronique ou le formulaire 2735) et l’impôt sur les dons payé dans le mois suivant la divulgation du don à l’administration fiscale :
- La date du don (transfert, encaissement du chèque, livraison du bien) n’est pas pertinente ;
- Il faut faire une distinction entre la divulgation (qui est le point de départ de la période d’un mois au cours de laquelle la déclaration et le paiement doivent être effectués) et la déclaration (via le déclaration ou formulaire 2735). Mais la divulgation est le plus souvent matérialisée par la date de la déclaration électronique ou du dépôt du formulaire 2735 auprès de l’administration fiscale : la date de divulgation et de déclaration est la même dans ce cas.
Note : BOI-ENR-DMTG-20-10-20-10 §70 : L’événement donnant lieu à l’impôt sur les donations est en principe constitué par la date de divulgation du don manuel par le donataire (cf. I-A-§ 30). Pour la Cour de cassation (com., arrêt du 10 octobre 2000 n ° 97-21591), la date à laquelle le don manuel a été fait n’est pas pertinente en ce qui concerne l’imposition du droit de donation, dont l’événement d’application est constitué soit par l’acte contenant la déclaration du don par le donataire ou ses représentants, soit par la reconnaissance judiciaire du don, ou par sa divulgation à l’administration. Le don manuel en question ayant été révélé à l’administration après l’entrée en vigueur des II et III de l’article 15 de la loi no 91-1322 du 30 décembre 1991, le tribunal a eu raison de confirmer la décision rejetant la plainte, selon laquelle les contribuables ont affirmé que le don manuel qui leur a été faite le 6 juillet 1987 était exonérée d’impôt conformément à la législation applicable avant la loi susmentionnée. Aux termes de cet arrêt, la Cour de cassation confirme la doctrine de l’administration selon laquelle la législation applicable est celle en vigueur à la date de la divulgation du don manuel à l’administration par le donataire (Cass. Com, arrêt du 19 mai 1998, n° 96-16252).
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Il existe cependant un dispositif peu connu qui permet de révéler un don sans avoir à payer immédiatement d’impôt sur les dons : il est en effet possible de faire un don manuel avec paiement des droits de succession après le décès du donateur.
Cette option est présentée à l’article 635 A du CGI. Extrait : « Les dons manuels mentionnés au deuxième alinéa de l’article 757 doivent être déclarés ou enregistrés par le donataire ou ses représentants dans un délai d’un mois suivant la date du dont le donataire a divulgué le don aux autorités fiscales. Toutefois, pour les dons manuels d’un montant supérieur à 15 000€, la déclaration doit être faite :
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- Dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle le donataire a communiqué le don aux autorités fiscales ou, au choix du donataire au moment de la divulgation du don, dans un délai d’un mois à compter de la date du décès du donateur ;
- Dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle le don a été divulgué, lorsque cette divulgation est la conséquence d’une réponse du donataire à une demande de l’administration ou d’une procédure de contrôle fiscal.
Article 635 A CGI
Pour bénéficier de cette option particulièrement intéressante, il suffit de remplir un formulaire CERFA 2734 (et donc ne pas remplir le CERFA 2735) intitulé « RÉVÉLATION D’UN DON MANUEL D’UNE VALEUR SUPÉRIEURE ». THAN 15 000€ — Option pour la déclaration et le paiement des droits après le décès du donateur ».
Le CERFA 2734 , à remplir au moment du don, vous permettra donc, non pas de déclarer le don, mais de le révéler.
Le CERFA 2735 ne doit être rempli et remis aux autorités fiscales que dans le mois suivant le décès du donateur (en indiquant dans la case I : « Suivi facultatif pour la déclaration et le paiement des droits après le décès du donateur » et en précisant la date du décès).
La valeur imposable, le tarif et les indemnités sont ceux au jour de la déclaration (c’est-à-dire dans le mois suivant le décès). À savoir que lorsqu’il s’agit d’une somme d’argent, même en cas de réemploi immédiat d’un actif, au niveau fiscal, la valeur à prendre en compte est la valeur nominale donnée (en revanche, au niveau civil, pour le calcul de la réserve héréditaire, la valeur du les actifs dont la somme d’argent a été réutilisée seront pris en compte).
Exemple (Fidroit) : M. C a deux filles, Mme D et Mme E, et souhaite les récompenser à parts égales : il procède ensuite, sans les déclarer aux services fiscaux, aux dons manuels suivants :
- Une somme d’argent de 20 000 euros au profit de Mme D, grâce à laquelle Mme D acquerra ultérieurement une entreprise.
- Un chef-d’œuvre d’une valeur de 20 000€ au profit de Mme E.
Au décès de M. C, l’entreprise et le tableau valent tous deux 40 000€, et les dons manuels seront déclarés comme suit dans la déclaration de succession déposée auprès du SIE :
- La somme d’argent remise à Madame D sera déclarée pour sa valeur nominale, soit 20 000€ ; nous ne tiendrons pas compte du fait qu’elle a été utilisée pour acquérir une entreprise qui vaut aujourd’hui 40 000€.
- Le tableau principal donné à Madame E sera déclaré pour sa valeur actuelle de 40 000€.
Conclusion : Mme D sera taxée sur 20 000 euros (alors qu’elle a une entreprise de 40 000 euros) et Mme E sera taxée sur 40 000 euros (alors qu’elle avait reçu 20 000 euros comme sa sœur).
Nous voyons donc que l’égalité est scrupuleusement respectée dans la pratique : Mme D et Mme E ont reçu chacune 20 000 euros et la propriété qu’elles possèdent vaut désormais 40 000 euros. Mais, au niveau du droit fiscal, l’égalité n’est pas respectée, puisque l’un sera imposé sur 20 000€ et l’autre sur 40 000€ (attention, ce n’est pas le cas du droit civil, qui tiendra compte, dans les deux cas, de la valeur de 40 000€
Cette option de versement des prestations au décès du donateur présente deux avantages :
- Dans le cas où toutes les indemnités pour la durée de la détention sont consommées, le don pourrait éventuellement bénéficier des allocations renouvelées en cas de décès plus de 15 ans après le don, ou différer le paiement des droits le lorsque le donataire a reçu des actifs de la succession.
- En outre, un parent peut également souhaiter conserver les allocations dont il dispose afin de donner un bien dans un avenir proche, par exemple. Il pouvait ainsi faire un don manuel au préalable sans les consommer, en reportant le paiement des frais à une date ultérieure (en l’occurrence celle de leur décès).
Pourquoi une telle option ? Quel est l’intérêt de l’administration fiscale ?
La prise de conscience des dons manuels est une question importante pour l’administration fiscale car il est tentant de ne jamais révéler cette transmission (et l’administration fiscale dispose de très peu de moyens pour retracer les dons de sommes d’argent (sauf en cas de décès rapide après le transfert d’argent).
En effet, conformément à l’article 635 a du CGI , les dons manuels doivent être soumis à l’impôt sur les transferts en franchise d’impôt dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle le donataire a communiqué le don aux autorités fiscales.
Mais que se passe-t-il si nous oublions de révéler ce cadeau manuel ? En pratique, pas grand-chose car les autorités fiscales ne sont pas au courant de ces mouvements d’argent entre parents et enfants. Seule une mort rapide après le transfert d’argent par don manuel pourrait donner l’occasion d’une proposition de révélation non spontanée. Dans ce cas, les droits seraient dus, sans aucune pénalité dans un délai d’un mois après la divulgation non spontanée.
Attention également dans le cas de plusieurs héritiers réservés et dans le cas où l’un d’eux ne bénéficie pas de ce don manuel : il peut être tenté de le révéler au décès du donateur afin que l’équité soit rétablie.
Ainsi, en dehors des cas ci-dessus, il est difficile pour l’administration pour convaincre de la nécessité de révéler ce cadeau manuel. Le fait de proposer cette option de paiement après le décès du donateur permet à l’administration de se donner les moyens d’obtenir les informations qui lui permettront d’être taxée ultérieurement. Il s’agit vraiment de ne pas décourager les donataires de déclarer les dons manuels.
Une relecture attentive des discussions parlementaires lors du vote sur cette option en témoigne : Cet article, qui est le résultat d’une initiative de notre collègue le député Gilles Carrez, a été adopté avec l’avis favorable du gouvernement. Il vise à clarifier le système de divulgation des dons manuels et le paiement des taxes de transfert gratuites relatives à ces dons, dans le but d’encourager la divulgation anticipée de ces dons.
L’objectif d’encourager la divulgation précoce des dons manuels doit être soutenu. En effet, elle devrait permettre une meilleure imposition des dons manuels non divulgués, qui échappent à toute imposition, et contribuer à freiner cette forme d’évasion fiscale. Il est clair en effet que de telles pratiques peuvent conduire à l’évaporation d’une partie importante de l’assiette fiscale pour les impôts sur les transferts gratuits, notamment dans le cas de transferts d’entreprises. » Nous avons clairement lu la confirmation de cette « fraude » qui consiste à ne jamais révéler de dons manuels.
Auteur : Vanessa TORRE — Ingénieur patrimonial au sein de l’entreprise SEFIMA